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On n'est rien qu'une image
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20 octobre 2005

Rage

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C’est la nuit.

Nous voilà dans un petit village Ecossais où nous avons réservé un B&B.

J’ai froid. Je suis emmitouflé dans mon écharpe brune. J’aurai du prendre un polaire. J’en achèterai un demain.

C’est agréable de marcher. Mes jambes commençaient à s’impatienter dans la position assise. On  a beaucoup roulé.

L’air frais me fait du bien. Je ressens toujours une exaltation à découvrir un endroit pour la première fois. Savoir que rien n’est important. Que l’on repart bientôt. Aucune attache. Tout est superficielle. Il n’y a que l’instant présent. Le vent qui griffe mon visage. Mes genoux engourdis. La sensation de la plante de mes pieds sur les trottoirs. Mon regard qui balaie les rues. L’anglais made in Scotland et le français made in Québec dans mes oreilles.

J’ouvre la porte du pub. Le bruit. Nous entrons.

Alexis et Sylvain commandent une énorme bière. Je commande un thé.

Sylvain se renseigne sur la route à prendre pour atteindre notre B&B. Le gars lui répond avec une haline éthylique :

-         Tu ne trouveras jamais ! C’est clair… dans la nuit … c’est impossible !

Réponse sincère. Il donne malgré tout des explications. On téléphone à nos hôtes.

Plein d’enthousiasme, on reprend la voiture. Plus nous roulons plus l’enthousiasme s’évapore. Plus que de la vapeur. Il faut se rendre à l’évidence. Nous sommes sur un chemin fréquenté uniquement par les tracteurs. On est perdu. Il est 10 P.M. Sylvain va sonner dans une maison illuminée pour demander des renseignements. J’observe la scène dans la chaleur de la voiture.

Une femme ouvre la porte. Un homme arrive. Il serre la main à Sylvain. Les trois rentrent dans la maison. Scénario de film d’horreur. Le couple pratique la magie noire. Ils sont cannibales. Tant pis pour Sylvain. Le garçon a déjà bien vécu. Il ne mourra pas idiot. Il a connu les leçons philosophiques du vieux Haas. Mais moi, je veux vivre et je n’ai pas la clé de la voiture. S’enfuir à pieds. Impensable. Il fait froid et … et puis non … Sylvain ressort tout souriant. Le couple était adorable. Nous savons où aller. Sophisme. C’est une route de campagne. Il n’y a rien. Nous sommes perdu. Soudain, un homme barbu descend de sa moto à quatre roues. Il s’approche de la voiture.

-         Etes-vous Mr. Salad

Notre hôte était venu en bas de la colline nous accueillir.

Nous le suivions attentivement au milieu du labyrinthe formé par les petits chemins.

Le vieil alcoolique avait raison. On n’aurait jamais trouvé. La maison au bout de la colline.

Il est bientôt 23h. On nous informe qu’un restaurant du village est encore ouvert. Et c’est là que les aventures commencent.

Etrange ce petit restaurant Indou dans un village au bout du monde. Il n’y personne à l’exception du patron du restaurant. Il s’appelle : RAGE

Rage est dépressif. Il souffre d’une grave carence affective. Je pense même qu’il n’a pas du voir des clients depuis une semaine.

Une fois le repas servi. Il vient nous raconter sa vie, sa vision du monde, sa philosophie.

Pour résumer le monde selon Rage : Il y a des bonnes personnes et des mauvaises personnes mais parfois les mauvaises personnes deviennent des bonnes personnes. Rage est allé une semaine en vacances en Espagne. Il a payé son billet 6 £. L’Espagne est un beau pays. Il parle. Il parle. Il parle. On écoute. On écoute. On écoute.

Je suis fatigué. J’esquisse de temps en temps un sourire. Brusquement, la musique d’ascenseur qui accompagne le sermon vielle hippie pathétique de Rage, se bloque sur la même note. La scène me paraît surréaliste. La même note se répète inlassablement. Personne ne semble réagir. J’observe Rage gesticuler comme un pantin. Mes camarades l’écouter avec patience. Et cette note qui se répète encore et encore … et Rage qui bouge et qui parle et la note … et Rage … finalement notre cher Rage va éteindre la musique. Et il revient nous parler.

Nous sommes sur le point de partir. Rage prend Sylvain dans ses bras. Il lui dit :

-         Si tu as besoin de quelques choses vient me demander.

-         Même de l’argent, répond Sylvain en rigolant.

Premier silence de Rage.

-         Même de l’argent, répond le gentil Rage.

Et Rage continue.

Le prude garçon que je suis est outré, scandalisé, ulcéré. Perdu dans la traduction. Je comprends que rage dit à Sylvain « Taste me ». Il répète plusieurs fois à Sylvain. « Taste me »… je comprends mon erreur de traduction Rage disait :

-         Test me, test me, test me, …

Nous avons quitté le restaurant sans même une réduction sur le ticket.

A ma connaissance Sylvain n’est jamais retourné tester Rage.

Rage est encore entrain de l’attendre dans son petit restaurant.

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Commentaires
L
AHahahAHahahhA - ça m'a encore fait rire aux éclats cette histoires de Raj, j'admets que moi aussi ça m'a complètement traumatisé !! Surtout la fameuse scène où le CD de l'indien se met à sauter sur la même note avec Raj qui continue à parler comme si de rien n'était.. comment un indien peut-il bien passer de Bangalore à Aberfeldy, ça tient du mystère.. tout cela était surréel, effectivement.. le type en 4x4, la dame aux ogives nucléaires qui tenaient mordicus à nous trouver un resto encore ouvert, l'indien over-sympathique et le lièvre sur la route qui repassait au même endroit..
S
AhahahHAhahaHAHahaha, osti qu'c'est hot ton histoire !! <br /> <br /> Bien sûr, c'est ultra chouette que le type se fasse dénommer RAGE dans ce merveilleux 'recall' des événements, mais le type s'appelait Raj.. mais bon, c'est génial que tu ais entrevu l'histoire de RAGE !!!<br /> <br /> Yéh !
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